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Jardin des Affouches


Dolène et Bernard nous accueillent à l'entrée de ce que nous sentons déjà être un jardin merveilleux. Tout se prête à une entrée en matière des plus amènes. Outre le soleil de cette claire matinée, l'accueil chaleureux des propriétaires permet très vite des échanges sur le mode de la plus cordiale convivialité.

Depuis le chemin d'accès et sous le couvert de grands arbres, le paysage  se découvre jusque vers la Ravine de la Grande Chaloupe et plus loin encore le grand Océan se fige.

Bernard nous rappelle que nous sommes ici sur les plus vieilles terres réunionnaises, les plus anciennes coulées du massif du Piton des Neiges. Ce domaine se trouve après la remontée de la Ravine de la Grande Chaloupe, juste après l'entrée de la piste vers la Plaine d'Affouches, et jouxte le Domaine Fleurié.

Mais autant le Domaine Fleurié nous avait laissé une impression de terre rude sur laquelle le soleil pouake, autant nous trouvons ici un havre de tranquillité et d'ombrages accueillants.

De même autant le périple du Domaine Fleurié n'offrait au regard que relativement peu d'espèces, autant ici chaque pas permet de découvrir une multitude de plantes d'au-delà des mers, de plantes qui ornent les jardins réunionnais, et qui pour beaucoup appartiennent aux traditions créoles. 


Le premier arbre à nous accueillir est l'arbre pieuvre, un Scheffleravigoureux, trop vigoureux peut-être car devenu envahissant sur l'île.

Nous avançons lentement le long du chemin d'accès et ses bordures de Petit Bambou, et découvrons ensuite un massif de Bambou plein dont on fait les échafaudages dans ce qui fut le Céleste Empire. On a pu voir des tiges sectionnées effectivement pleines, parfois percées d'un trou minuscule en leur centre.

Un pied d'zévi qui en cette fin de l'hiver austral a perdu ses feuilles et arbore des fruits qui peuvent faire penser de loin à des citrons encore verts voisine avec un pied de Gros Galanga, alias Larmes de la Vierge (Alpinia zerumbet ou Alpinia speciosa).

Un peu plus loin le Petit Galanga lui offre ses fleurs odoriférantes. Cette plante aurait été utilisée pour contenir les odeurs de transpiration.

Un Benjoin-pays offre ses feuilles juvéniles (hétérophyllie) très décoratives.

La Liane aurore s'est emparé de branches accueillantes.

La présence de parachutes dans certaines d'entre elles signale la présence de l'Aristoloche. Sa fleur spectaculaire a donné à la plante son autre nom : le Jabot de dinde.

Un Érythrine alias Nourouc alias Pion d'Inde (le non toxique contrairement à son homonyme) est une Fabacée que l'on trouvait dans les cours créoles, utilisé comme tuteur pour les treilles de chouchou ou de raisin.

Un superbe et florissant Vacoa des bas, Pandanus utilis fait notre admiration. Dans un milieu préservé, il donne toute sa puissance.

Discrète et adorable, une iris créole prend un bain de lumière au bord du chemin.

Autre arbuste discret et fleuri, le Mimosa d'Australie qui porte bien son nom.

Non loin d'un Pongame, en retrait, un arbuste qui pourrait être un Takamaka  bord de mer (Chaulmoogra ?) qui fut en son temps utilisé par le Père Clément Raimbault pour soigner les lépreux à la léproserie de Saint-Bernard à la Montagne, non loin du Jardin des Affouches. 

Une petite fleur violette, la Monarde (? ? ? ) imite le chardon de loin.

Superbe, le petit Grevillaire, ou Grévillea rouge, Grevillea Banksii , a fière allure.

La Langue de Belle-mère tire son nom de ses feuilles rugueuses mais sa fleur est superbe. Cinq sépales que l'on prend pour des pétales forment l'écrin du reste de la fleur ramassé en une minuscule boule au centre.

La mousse espagnole, Tillandsia usneoides a quelque chose de la barbe des Zarabes. Elle est en fait constituée de milliers de minuscules plantes accrochées les unes au autres. Tillandsia usneoides est de la même famille que l'ananas (broméliacées) et non un lichen comme on pourrait le penser.

Ce que nous pensons être du Patchouli est un faux. Le Faux Patchouli ou Gros Baume s'utilise en phytothérapie contre les maux de tête, la toux, les mycoses, les furoncles...

Un grand Camphrier a laissé tomber quelques feuilles où l'on distingue des domaties.

Le Champac concurrence l'Ylang-Ylang comme base de parfum.

On félicite Dolène pour avoir donné vie à de la roche qui n'a pas vu le jour depuis des millions d'années peut-être : elle utilise les carottes de forage du Chantier de basculement des eaux pour en faire de mystérieux petits personnages.

 Des Palmistes Rouges qui n'ont ici rien à craindre semblent vouloir protéger de leurs redoutables épines la plantation de Café Bourbon pointu, dont on sectionne les gourmands au pied, car ils ne produisent pas de cerises. Celles-ci sont sur les branches hautes, taillées en permanence pour permettre la cueillette à hauteur d'homme. Il faut 700kg de cerises pour faire 100kg de café.

Thé ou café, les deux poussent en ces lieux magiques où sont concentrées des centaines d'espèces. Saluons le travail accompli, jour après jour.

Notons au passage que si un système d'irrigation a été utilisé aux premiers temps de la mise en œuvre du jardin, il n'est plus en service. Paresseux, les arbres laissaient leurs racines en surface là où leur arrivait l'eau. Ils doivent désormais la chercher en profondeur et résistent mieux aux cyclones.

Les cyclones sont pour Dolène et Bernard une hantise. Toute une récolte de café peut être anéantie par le passage d'un météore, qui peut faire ressentir ses effets plusieurs années après.

En guise de coupe-vent, une certaine institution a recommandé de planter du Calliandra,  Mimosacée d'origine américaine plantée comme haie fourragère ou coupe-vent, et qui n'a pas eu l'effet attendu.

Au milieu de l'atelier de sculpteur dans le jardin devant la maison est suspendu une étrange liane qui se révèle être une curieuse orchidée.

Un vrai jardin créole ne saurait être dépourvu de girofliers. On trouve ici en plus de la cannelle, un vrai poivrier, et de jeunes plants de cacao.

Et puisque nous en sommes à parler cuisine, notons la présence de jeunes palmistes multipliants, des Palmiers pêches qui peuvent remplacer le cœur de Palmiste rouge, et qui ont l'avantage de repousser après décapitation.

Et bien sûr, on ne peut mentionner toutes les plantes présentes en ce jardin, mais toujours au chapitre de la cuisine, on remarque des pieds de rouroute, qui tire son nom peut-être de l'occupation anglaise, et de ses racines (roots) que l’on pourrait comparer à des pointes de flèches (arrow), donc des arrow roots, mots qui prononcés à la créole sont francisés en la rouroute dont on fai(sai)t de délicieux bonbons (petits biscuits ronds).

Note visite s'achève par des boissons rafraîchissantes à base d'hibiscus, dont un jus et un thé, et de délicieux petits gâteaux.

Il est proposé aux visiteurs de petits pots de gelée, confiture et crème de diverses saveurs dont le café, le letchi, le curcuma...Vertiges d'épices.

Nous remercions très très chaleureusement nos hôtes pour la visite d'un Eden qui leur prend beaucoup de temps. Mais quelle passion ! 

© F. Duban 2015