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Etang du Gol

À la rescousse des Tilapias


Merci à Jan-Paul LE GUELTE et Monique SIBOUT pour leurs photos.


La piste défoncée et bordée de détritus qui mène aux bords de l'étang ne laisse rien augurer de l’espace très riche en ressources animales et surtout végétales que nous allons découvrir ce matin. Nicole CRESTEY rappelle que le terrain bordant l’Étang du Gol a été acquis par le Conservatoire du littoral dont le logo est apposé sur les pancartes interdisant les véhicules motorisés à l’entrée des pistes au départ du parking.

Nous repérons les denses Faux-poivriers (Schinus terebinthifolius Faux poivrier       ANACARDIACEE Amérique du Sud) qui abritent du soleil des tables à pique-nique.

Les premières explications botaniques concernent les joncs et autres roseaux et fort opportunément à ce moment-là passe un ramasseur de “voune” (roseaux) et sa volumineuse charge (Photo de JPLG).

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Il nous laisse très obligeamment photographier et confirme que son chargement servira à empailler les fameuses chaises du Gol, petites chaises basses traditionnelles qui font partie du patrimoine artisanal réunionnais. Leur fabrication perdure, et semble même regagner en vigueur. Plusieurs membres du groupe signalent des ventes sur les marchés locaux ou par des forains ambulants sur la Côte ouest.

Nicole CRESTEY revient sur la présentation générale de l’environnement que nous allons explorer ce jour. Il existe trois étangs littoraux à La Réunion, chacun en relation avec un cirque : Bois Rouge (Salazie), Saint-Paul (Mafate) et l’Étang du Gol (Cilaos).  Les courants littoraux ont transporté les matériaux issus de l’érosion le long de la côte formant un cordon littoral derrière lequel s’est formé un étang. Pour chacun d'entre eux, le passage vers la mer est le plus souvent à sec. De fortes marées ou de fortes pluies forcent le passage parfois. 

Ce sont des milieux très intéressants, très riches biologiquement parlant. Nous le constatons ne serait-ce qu’en raison de l’abondance de vols de libellules et demoiselles alentour (Photo de Monique SIBOUT). Les oiseaux de ces espaces lacustres sont également nombreux : poules d’eau (nous entendrons leurs cris à plusieurs reprises), hérons, butors... De nombreux migrateurs hantent les lieux, dont les chevaliers. C’est l’occasion de rappeler que le week-end précédent (21-22 avril) a été  un week-end “sans lumière” pour faciliter l’envol des jeunes Pétrels de Barau (http://www.seor.fr/actualite.php).

Le terrain alentour est donc la propriété du conservatoire du littoral, la gestion étant confiée au GROUPEMENT POUR LA CONSERVATION DE L'ENVIRONNEMENT ET DE L’INSERTION PROFESSIONNELLE (GCEIP) qui emploie temporairement des jeunes pleins d’enthousiasme. 

Nombreuses sont les vaches moka alentour qui contribuent à entretenir le paysage, à contenir les espèces envahissantes et à maintenir ainsi un espace ouvert où pousse l’herbe dont elles se nourrissent. 

Autour de nous de nombreux plans d’eau : des gravières (Photo de Monique SIBOUT) et les différentes branches de l’étang proprement dit. Les deux gravières ont servi à la construction des routes du sud. Elles appartiennent à la Mairie de Saint-Louis, fortement endettée, et dont les projets pourraient menacer cet espace. 

Autre menace, l’usine du Gol, seule usine de l’Ouest à traiter la canne, dont les effluents, même s’ils sont a priori traités, arrivent à s’échapper des conduits officiels, étouffant le milieu. Ce sont les poissons qui en souffrent le plus. 

Les eaux ici sont peuplées de Tilapias (Oreochromis niloticus ??? Culia rupestris ???) , de carpes, de poissons guppy. Ces derniers détruisent notamment les larves de moustique. 

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Sur les berges de la première gravière, de grands roseaux (Typha domingensis Voune, jonc  TYPHACEE  indigène ?) balancent leurs inflorescences (massettes). 

Sur celles de la seconde, des joncs (Juncus effusus Jonc JUNCACEE indigène ?(Photo de JPLG).

Les inévitables Tamarins de l’Inde alias Tamarins “de laine” (Pithecellobium dulce Tamarin d’Inde FABACEE Amérique centrale) sont omniprésents. 

L’ONF qui fait des essais sur les plantes résistant à la sécheresse a planté ici une variété d’acacia (Acacia auriculiformis FABACEE Australie(Photo de JPLG).

Sur l’étang flotte un tapis végétal dense de Pensées d’eau (Cr.) ou Jacinthes d’eau (fr.) (Eichhornia crassipes Jacinthe d’eau PONTEDERIACEE Amérique du Sud), et de Laitues d’eau (Pistia stratiotes Laitue d’eau ARACEE pantropicale). Un barrage flottant semble les contenir  (Photo de JPLG).

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Si l’on remet à l’eau une Laitue d’eau avec son système racinaire en l’air, au bout de moins de cinq minutes, la plante se remet à l’endroit (Photo de Monique SIBOUT). La Jacinthe d’eau fait de même en utilisant ses flotteurs.

Dans les herbes nous trouvons 

Un buisson de Raquette (Opuntia ficus-indica Raquette CACTACEE Mexique) en fleurs est l’occasion de rappeler que toutes les cactacées (ou cactées) sont originaires d’Amérique sauf la Perle, cactacée épiphyte  (Photo de JPLG).

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De beaux spécimens de Calice du pape (Tabebuia Pallida, Calice du Pape Bignoniaceae Amérique tropicale) sont en fleurs. J.-P. L. fait remarquer la terminaison des branches en trois feuilles, qui peut aider à identifier l’arbre  (Photo de JPLG)

Non loin de là se dressent de grands filaos (Casuarina equisetifolia Filao CASUARINACEE Australie, Nlle Calédonie). Les chaudières du Ti Train Lontan étaient alimentées de leur bois. 

Nous grimpons sur la plate-forme du kiosque en toute connaissance de cause après avoir lu le rappel de la Mairie victime du syndrome de Furiani.

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Au loin passent des militaires en manœuvre le long des vestiges du pont de l’ancienne ligne de chemin de fer dont on distingue un pilier encore intact. Par moments l’écume des vagues qui “pètent en fleurs” de l’autre côté de la barrière de galets qui marque l’exutoire de l’étang. 

« Midi, roi des étés, étendu sur la plaine » brûle partout de mille feux.

Un massif de chokas bleus (Agave vera-cruz Choca bleu AGAVACEE Mexique) côtoie un plan d’Aloès amer (Aloe vera Aloès amer ASPHODELACEE SW Arabie). 

Dans l’herbe abondent les pieds de Petit chiendent (Cynodon dactylon Petit chiendent                POACEE indigène ?).

Le   Carambole marron (Terminalia arjuna Carambole marron ou Arjan des Indes Combretaceae Inde ???) est un badamier dont le nom évoque Arjuna, le prince guerrier attendant la bataille cosmique dans la Bhagavad-Gītā  (Photo de JPLG). L’arbre s’observe assez souvent sur la côte ouest où il est planté pour orner les rues de certaines villes.

Les pompons en chatons des fleurs des Zépinards (Prosopis juliflora Mimosoideae Mexique, Amérique du Sud et Caraïbes) côtoient de redoutables épines qui en font donc logiquement des épinards  (Photo de JPLG).

Le Jamblon (Syzygium cumini ou Syzygium jambolanum Jamblon ou jamelonier ??? ???) est bien connus des Réunionnais qui adorent ses petits fruits. On l'utilise contre le diabète et pour arranger le rhum.

Un Margosier ou Lilas de Perse (??? ???? ???) doit son nom vernaculaire à l’amertume de ses feuilles qui se compare à l’amertume de la Margose, légume de la cuisine réunionnaise  (Photo de JPLG)

Nous reconnaissons un Acajou du Sénégal (Khaya senegalensis Acajou du Sénégal MELIACEE Afrique occidentale) que nous avons rencontré lors de la sortie de l’Étang Salé  (Photo de JPLG)

Deux Tamarins, l'un Tamarindus indica (Tamarin des bas Tamarindus indica FABACEE Exotique) et l'autre "de laine" (Tamarin d’Inde Pithecellobium dulce FABACEE Exotique) permettent de distinguer l'un de l'autre  (Photo de JPLG)

Un pied de Raisin de mer semble un peu souffrir de la chaleur et de son éloignement du littoral.

On trouve de ce côté de l'étang de nombreux eucalyptus.

Nous nous enfonçons dans une forêt littorale qui avec la chaleur et l’humidité ambiantes fait dire à certains que nous entrons en Amazonie. 

La Zerb' bourrique (Ludwigia octovalvis Herbe à bourrique ONAGRACEE indigène ?) semble apprécier ce milieu couvert.

Le sentier se resserre.  Il longe un canal. La végétation est de plus en plus dense. En prenant un sentier perpendiculaire nous rejoignons la partie ouest de l’étang du Gol, celle qui longe la côte. Partout le tapis impénétrable des Laitues d'eau et des Jacinthes sur les eaux dormantes. Dans le canal le long du sentier, des clapotis révèlent la présence des Tilapias qui s’enfuient à notre arrivée. Nous sommes peut-être en territoire de braconniers.

Le long du sentier on trouve des touffes de Papyrus (Cyperus involucratus Papyrus CYPERACEE Afrique, Madagascar), qui n’est pas celui des anciens Égyptiens. La section des tiges en est triangulaire (Photo de Monique SIBOUT)

Les touffes d'herbe de riz (Setaria geminata Herbe de riz POACEE pantropicale), sont de plus en plus fournies (Photo de Monique SIBOUT) .

Il faut bientôt rebrousser chemin, le sentier étant impraticable et se perdant dans les étendues où le pied s’enfonce dans une eau dissimulée par un tapis végétal luxuriant.

Sur le chemin du retour, un arbre entier est recouvert des boules poilues du Poc-poc, une passiflore qui tient une grande place dans la culture créole (Photo de Monique SIBOUT).

Nous rejoignons le point de départ par un chemin sous les buissons de Faux-poivriers dont les petites baies rouges rutilent au soleil.

Juste avant de retrouver l’étang dans sa partie est, le canal que nous longeons, qui doit faire moins de cinq centimètres de profondeur et moins de vingt centimètres de largeur est un golgotha à Tilapias. Pur une raison inconnue, ils tentent de remonter le courant qui se dirige vers l’étang et ne trouvant pas assez d’eau, ils sont pris au piège, s’agitent en vain à grands coups de queue inutiles, agonisant en nombre.

J.-P. L. est le premier à les ramasser pour les rejeter dans l’étang. Les casquettes sont mises à contribution. Elles se remplissent de poissons d’une quinzaine de centimètres chacun brusquement redevenus frétillants qui retrouvent bientôt des eaux plus profondes. Nous devons en avoir sauvé une cinquantaine.  

Sous les Faux-poivriers nous trouvons une table libre, et nous pique-niquons  à l’ombre, repas sybaritique : le gâteau patate sous sa nappe de chocolat qui est partagé par tous est une absolue apothéose.





© F. Duban 2012